Dans cette partie, $A$ est une matrice normale et inversible de $M_n(\mathbb R)$ telle que $(A+I_n)^7=A^7+I_n$.
On pose $P=(X+1)^7-X^7-1$.
20) Déterminer les complexes $z\in\mathbb C$ tels que $\begin{cases}P(z)=0\\ P'(z)=0\end{cases}$ puis factoriser $P$ dans $\mathbb C[X]$ et dans $\mathbb R[X]$.
Avant tout calcul, on observe facilement que 0 et -1 sont racines de $P$. Maintenant on a que : $$\begin{align} \begin{cases}P(z)=0\\ P'(z)=0\end{cases} &\Longleftrightarrow \begin{cases}(z+1)^7-z^7-1=0\\ (x+1)^6=z^6\end{cases}\\ &\Longleftrightarrow \begin{cases}z^6(z+1)-z^7-1=0\\ (z+1)^6=z^6\end{cases}\\ &\Longleftrightarrow \begin{cases}z^6=1\\ (z+1)^6=z^6\end{cases}\\ &\Longleftrightarrow \begin{cases}z^6=1\\ (z+1)^6=1\end{cases}\\ &\Longleftrightarrow \begin{cases}\exists k\in[\![0,5]\!],z=e^{ik\pi/3}\\ \exists k'\in[\![0,5]\!],z=e^{ik'\pi/3}-1\end{cases} \end{align}$$ La première expression nous renseigne que $|z|=1$ donc on doit avoir $|e^{ik'\pi/3}-1|=1$, mais par la technique de l'angle moitié, on a que : $$\begin{align} |e^{ik'\pi/3}-1|=1 &\Longleftrightarrow |e^{ik'\pi/6}(e^{ik'\pi/3}-e^{-ik'\pi/3})|=1\\ &\Longleftrightarrow 2\sin(k'\pi/6)=1\\ &\Longleftrightarrow k'=1\text{ ou }k'=5. \end{align}$$ Pour $k'=1$, on trouve alors par la technique de l'angle moitié que $$z=e^{i\pi/3}-1=e^{i\pi/6}(e^{i\pi/6}-e^{i\pi/6})=2ie^{i\pi/6}\sin(\pi/6)=e^{i\pi/2}e^{i\pi/6}=e^{i2\pi/3},$$ c'est à dire $k=2$. Puisque le polynôme est réel, on sait automatiquement que l'autre racine complexe sera $e^{-i2\pi/3}$ et l'étude de $k'=5$ n'est pas utile. Il suit que $e^{i2\pi/3}$ et $e^{-i2\pi/3}$ sont racines complexes doubles.
En développant $P$, on observe que $P$ est de degrés 6, de coefficient dominant 7. La somme des multiplicités des racines doit donc être 6. Mais comme $e^{i2\pi/3}$ et $e^{-i2\pi/3}$ sont de multiplicité au moins 2, on a que $$mult(e^{i2\pi/3})+mult(e^{-i2\pi/3})+mult(0)+mult(-1)\geq 2+2+1+1=6=deg(P),$$ et il n'y a pas d'autre racines que celles trouvées. La décomposition de $P$ dans $\mathbb C$ est alors : $$P=7(X-e^{i2\pi/3})(X-e^{-i2\pi/3})X(X+1),$$ et dans $\mathbb R$ : $$P=7(X^2+X+1)X(X+1).$$
21) Montrer que $A$ est une matrice orthogonale de $\mathbb R^n$.
$P$ étant annulateur de $A$, les valeurs propres possibles de $A$ sont $0$, $-1$ et $e^{2i\pi/3}$. Mais par hypothèse $A$ est inversible donc $0$ ne peut être valeur propre de $A$ donc les valeurs propres possibles de $A$ sont $-1$ et $e^{2i\pi/3}$. $A$ étant normale, d'après 18) il existe une base orhonormale dans laquelle la matrice de l'endomorphisme associé à $A$ a pour forme : $$D=\begin{pmatrix}-1 & 0 & \dots & \dots & \dots & 0\\ 0 & \ddots & \ddots & & & \vdots\\ \vdots & \ddots & -1 & & (0) & \ddots\\ \ddots & (0) & & R_{2\pi/3} & \ddots & \vdots\\ \vdots & & & \ddots & \ddots & 0\\ 0 & \dots & \dots & \dots & 0 & R_{2\pi/3}\end{pmatrix}$$ On remarquera plus précisément qu'il existe une matrice de passage orthogonale $P$ (c'est à dire vérifiant $^t\!P=P^{-1}$) telle que $$A=PD\ ^t\!P.$$
On observe maintenant que la matrice $R_{2\pi/3}$ a pour forme : $$\frac{1}{2}\begin{pmatrix} 1 & \sqrt{3}\\ -\sqrt{3} & 1 \end{pmatrix}$$ et un simple calcul nous montre que $^t\!R_{2\pi/3}R_{2\pi/3}=I_2$. Il suit alors que $$^t\!DD=I$$ et donc $$^t\!D=D^{-1}.$$ Par orthogonalité de $P$, on a alors que $$^t\!A=\ ^t\!(PD\ ^t\!P)=P\ ^t\!D\ ^t\!P=PD^{-1}P^{-1}=(PDP^{-1})^{-1}=A^{-1},$$ ce qui est la preuve de l'orthogonalité de $A$.
22) Montrer que $^t\!A$ est un polynôme en $A$.
On reprend les mêmes notations que dans la réponse à la question 21). On observe que $(R_{2\pi/3})^3=R_{2\pi}=I_2$ donc $(R_{2\pi/3})^6=I_2$. Il suit alors que $D^6=I$ et donc par othogonalité de $D$ (vue dans la réponse à la question 21) que $^t\!D=D^{-1}=D^5$. Il suit alors que $$^t\!A=\ ^t\!(PD\ ^t\!P)=P\ ^t\!D\ ^t\!P=PD^5\ ^t\!P=PD^5P^{-1}=(PDP^{-1})^5=A^5,$$ donc $^t\!A$ est bien un polynôme en $A$.
23) On suppose de plus que $n$ est impair et que $A\neq -I_n$, déterminer le polynôme associé à $A$.
On a vu dans la réponse à 21) que les valeurs propres de $A$ sont parmi 1 et $e^{2i\pi/3}$. Puisque $A\neq -I_n$, $-1$ ne peut être l'unique valeur propre. D'autre part si $e^{2i\pi/3}$ était l'unique valeur propre, la matrice $D$ serait une matrice blocs constituée de matrices $R_{2\pi/3}$ sur la diagonale et par conséquent la taille de $D$ doit être paire (car $R_{2\pi/3}$ est de taille $2\times 2$). Ceci contredit que la dimension de l'espace est impaire. Par conséquent les valeurs propres de $A$ sont 1 et $e^{2i\pi/3}$. D'après 13), le polynôme associé à $A$ est donc : $$\pi_A=(X+1)(X^2+X+1).$$
Dans cette partie $A$ est une matrice normale non nulle de $M_n(\mathbb R)$, $f$ l'endomorphisme canoniquement associé à $A$. On note $\pi_A$ le polynôme associé à $A$, tel que défini à la question 13.
On désire démontrer que $^t\!A$ est un polynôme en $A$.
Plus précisément, on cherche un polynôme $P\in\mathbb R[X]$, de degré inférieur ou égal à $n-1$, tel que $^t\!A=P(A)$.
24) Quel polynôme $P$ convient lorsque $\pi_A$ a toutes ses racines réelles?
On continue à utiliser les notations introduites dans les questions précédentes. Puisque $\pi_A$ a toutes ses racines réelles, d'après 12, $A$ a toutes ses valeurs propres réelles et donc $D$ est une matrice digonale. Il suit alors que $$^t\!A=\ ^t\!(PD\ ^t\!P)=P\ ^t\!D\ ^t\!P=PD\ ^t\!P=A.$$ Donc le polynôme $P=X$ convient (attention le $P$ de la formule du dessus est une matrice de passage qui n'a rien à voir avec le polynôme. Je n'ai pas voulu bousculer les notations).
Dans la suite de cette partie, on suppose que $A$ admet $2t$ valeurs propres complexes non réelles distinctes. On les note $\mu_1,\overline{\mu_1},\mu_2,\overline{\mu_2},\dots,\mu_t,\overline{\mu_t}$. Pour tout $q$ de $[\![1,t]\!]$, on note $\mu_q=\rho_qe^{i\theta_q}$, où $\rho_q$ est un réel strictement positif et $\theta_q$ un réel appartenant à $[0,2\pi[$. Enfin, on note $\lambda_1,\dots,\lambda_r$ les valeurs propres réelles distinctes de $A$.
On a : $\pi_A=\Pi_{k=1}^r(X-\lambda_k)\Pi_{q=1}^t(X^2-2\rho_q\cos \theta_q X+\rho_q^2).$
D'après la question 18, il existe une base orthonormée $C$ de $\mathbb R^n$ dans laquelle la matrice de $f$ est de la forme : $M_C(f)=\begin{pmatrix}\lambda_1 & 0 & \dots & \dots & \dots & 0\\ 0 & \ddots & \ddots & & & \vdots\\ \vdots & \ddots & \lambda_r & & (0) & \ddots\\ \ddots & (0) & &\rho_1R_{\theta_1} & \ddots & \vdots\\ \vdots & & & \ddots & \ddots & 0\\ 0 & \dots & \dots & \dots & 0 & \rho_tR_{\theta_t}\end{pmatrix}$ (les réels $\lambda_k$ pouvant être répétés plusieurs fois ainsi que les matrices $\rho_qR_{\theta_q}$).
25) Préciser $M_C(f^*)$.
En revenant à la définition, on observe que $^t\!R_{\theta}=R_{-\theta}$, donc $$M_C(f^*)=^t\!M_C(f)=\begin{pmatrix}\lambda_1 & 0 & \dots & \dots & \dots & 0\\ 0 & \ddots & \ddots & & & \vdots\\ \vdots & \ddots & \lambda_r & & (0) & \ddots\\ \ddots & (0) & &\rho_1R_{-\theta_1} & \ddots & \vdots\\ \vdots & & & \ddots & \ddots & 0\\ 0 & \dots & \dots & \dots & 0 & \rho_tR_{-\theta_t}\end{pmatrix}$$
26) Montrer que $(f^*=P(f))\Longleftrightarrow \left((\forall k\in[\![1,r]\!],\lambda_k=P(\lambda_k))\text{ et }(\forall k\in[\![1,t]\!],\overline{\mu_k}=P(\mu_k))\right).$
On a grâce à 25) que : $$f^*=P(f)\Longleftrightarrow M_C(f^*)=P(M_C(f))\Longleftrightarrow \left((\forall k\in[\![1,r]\!],\lambda_k=P(\lambda_k))\text{ et }(\forall k\in[\![1,t]\!],\rho_kR_{-\theta_k}=P(\rho_kR_{\theta_k})\right).$$ Il nous reste donc à démontrer que $\rho_kR_{-\theta_k}=P(\rho_kR_{\theta_k})\Longleftrightarrow \overline{\mu_k}=P(\mu_k)$. Or en reprenant la réponse à la question 3), on observe que les matrice $R_\theta$ sont toutes diagonalisables dans une même base complexe (il est important que ce soit la même base) $\left\lbrace\begin{pmatrix}1\\ i\end{pmatrix}, \begin{pmatrix}i\\ 1\end{pmatrix}\right\rbrace$ (je vous laisse prouver que c'est bien une base de $M_{2,1}(\mathbb C)$ et les arguments de diagonalisabilité!) de matrice diagonale $\begin{pmatrix}e^{i\theta_k} & 0\\ 0 & e^{-i\theta_k}\end{pmatrix}$. En observant que $\rho_k\begin{pmatrix}e^{i\theta_k} & 0\\ 0 & e^{-i\theta_k}\end{pmatrix}=\begin{pmatrix}\mu_k & 0\\ 0 & \overline{\mu_k}\end{pmatrix}$, on a enfin que $$\begin{align}\rho_kR_{-\theta_k}=P(\rho_kR_{\theta_k}) & \Longleftrightarrow \begin{pmatrix}\mu_k & 0\\ 0 & \overline{\mu_k}\end{pmatrix}=P\left(\begin{pmatrix}\mu_k & 0\\ 0 & \overline{\mu_k}\end{pmatrix}\right)\\ &\Longleftrightarrow \overline{\mu_k}=P(\mu_k)\text{ et }\mu_k=P(\overline{\mu_k}). \end{align}$$ Enfin, comme $P$ est réel, on a que $\overline{P(\mu_k)}=P(\overline{\mu_k})$ donc $\mu_k=P(\overline{\mu_k})$ est équivalent à $\overline{\mu_k}=P(\mu_k)$ et le résultat est prouvé.
On note $S=\Pi_{k=1}^r(X-\lambda_k)$ et $Q=\Pi_{q=1}^t(X^2-2\rho_q\cos\theta_q X+\rho_q^2)=\Pi_{q=1}^t(X-\mu_q)(X-\overline{\mu_q})$ et on introduit les familles de polynômes $(L_j)_{j\in[\![1,r]\!]},(Q_j)_{j\in[\![1,t]\!]}$ et $(T_j)_{j\in[\![1,t]\!]}$ telles que : $$\forall j\in[\![1,r]\!],L_j=\left(\Pi_{k=1,k\neq j}^r\frac{X-\lambda_k}{\lambda_j-\lambda_k}\right)\frac{Q}{Q(\lambda_j)},$$ $$\forall j\in[\![1,t]\!],Q_j=\frac{S}{S(\mu_j)}\left(\Pi_{k=1,k\neq j}^t\frac{(X-\mu_k)(X-\overline{\mu_k})}{(\mu_j-\mu_k)(\mu_j-\overline{\mu_k})}\right)\left(\frac{X-\overline{\mu_j}}{\mu_j-\overline{\mu_j}}\right)$$ $$\forall j\in[\![1,t]\!],T_j=\frac{S}{S(\overline{\mu_j})}\left(\Pi_{k=1,k\neq j}^t\frac{(X-\mu_k)(X-\overline{\mu_k})}{(\overline{\mu_j}-\mu_k)(\overline{\mu_j}-\overline{\mu_k})}\right)\left(\frac{X-\mu_j}{\overline{\mu_j}-\mu_j}\right).$$ Enfin on pose $P=\sum_{k=1}^r\lambda_kL_k+\sum_{k=1}^t(\overline{\mu_k}Q_k+\mu_kT_k)$.
27) Montrer que $P\in\mathbb R[X]$ et que $^t\!A=P(A)$.
$L_k$ est réel par construction ainsi que $\lambda_k$ donc $\sum_{k=1}^r\lambda_kL_k$ est réel. D'autre part en revenant aux définitions, on observe que $\overline{Q_k}=T_k$ donc $$\overline{\overline{\mu_k}Q_k+\mu_kT_k}=\mu_kT_k+\overline{\mu_k}Q_k,$$ ce qui prouve que $\overline{\mu_k}Q_k+\mu_kT_k$ est réel et donc aussi $\sum_{k=1}^t(\overline{\mu_k}Q_k+\mu_kT_k)$. Il suit que $P$ est réel.
Il est facile de prouver par caclcul direct que : $$(\forall k\in[\![1,r]\!],\lambda_k=P(\lambda_k))\text{ et }(\forall k\in[\![1,t]\!],\overline{\mu_k}=P(\mu_k)),$$ qui est la condition nécessaire et suffisante pour que $f^*=P(f)$ soit encore pour que $^t\!A=P(A)$.
28) Préciser $P$ lorsque $\pi_A=X(X+1)(X^2+X+1)$.
En appliquant la formule, on trouve $$X(X^2+X+1)+\frac{X(X+1)(X-e^{-2i\pi/3})}{(e^{2i\pi/3}+1)(e^{2i\pi/3}-e^{-2i\pi/3})}+\frac{X(X+1)(X-e^{2i\pi/3})}{(e^{-2i\pi/3}+1)(e^{-2i\pi/3}-e^{2i\pi/3})},$$ je vous laisse le soin de simplifier si ça vous chante!
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